Née le 11 août 1941 dans la tourmente
de la guerre, l'école des pupilles de l'air avait pour mission originelle
d'alléger les charges des familles dont le chef a disparu au service
de l'aviation, en prenant à sa charge l'instruction et l'éducation morale
des orphelins.
Le 28 avril 1939, le chef d'état-major général de l'armée de l'air reçoit
du général Bouscat, chef du cabinet militaire du ministre de l'Air,
une note en ces termes: Le ministre désire que l'on mette à l'étude
sans délais et qu'on lui fasse à ce sujet toutes propositions utiles,
la création d'une École d'enfants de troupes de l'Armée de l'air. Moins
de deux mois après, le 12 juin, le cabinet militaire projette d'établir
une École enfantine de l'air ainsi qu'une École des pupilles de l'air
où seraient données aux élèves une éducation et une instruction militaire
générale qui leur permettraient de participer dans les meilleures conditions
au recrutement des cadres de l'Armée de l'air." La création de l'école
est alors décidée et cette dernière dépendra du service des oeuvres
sociales de l'Armée de l'air. Dès lors, il faut trouver un local. La
zone nord étant trop perturbée, Grenoble est choisie, ville universitaire,
noeud économique déjà puissamment forgé, ornée de surcroît d'un cadre
somptueux. Et dans Grenoble, une clinique désaffectée, sise au croisement
des boulevards jean Jaurès et Vallier actuels, en est le premier siège,
prêt pour la rentrée scolaire de 1941. Première promotion de soixante
garçons -de sixième et de cinquième - dont le père était tombé au combat.
Paul Baujard sera le premier élève à franchir le porche de l'école.
Le régime de l'école est l'internat, avec port obligatoire de l'uniforme.
Les élèves revêtent donc l'uniforme de "jeunesse en montagne ", culotte
golf sur chaussettes blanches, blouson sombre et béret. L'insigne qu'ils
arborent est déjà défini, c'est l'emblème de l'école: " écu français
d'azur clair à un soleil rayonnant d'or hissant d'une champagne d'azur
foncé et de trois vols en bande d'azur foncé, d'émail blanc et de gueules
". À la rentrée suivante s'ouvre une classe de quatrième, les années
ultérieures proposant le cycle complet d'études jusqu'au baccalauréat.
À partir du mois de juin 1944, les beuglements des sirènes arrachent
les élèves du sommeil, réveil brutal, descente en catastrophe vers l'abri
salvateur. Là-haut, glissent les bombardiers dans leur atterrant ronron.
Remontée au dortoir, des kilos sur les paupières... Pour être sûrement,
encore, tiré du lit quelques heures plus tard. Le dimanche du 6 juin
1944 n'est pas tout à fait comme les autres, puisque c'est jour de communion
solennelle. Juste avant la messe, une fabuleuse nouvelle arrive: celle
du débarquement allié, en Normandie. Rassemblement, autour du mât des
Couleurs, formé avec l'émotion que l'on devine par le commandant de
l'école, le colonel Brumelot qui entame de tout son coeur le chant des
Adieux ! Le 23 août 1944: Paris en fièvre se libère. Dans les combats
de rue, un adolescent chargé de mission de liaison, tombe, foudroyé
par les balles. C'est Jacques Lorenzi: l'Ecole des pupilles de l'air
vient de perdre l'un des siens. Il avait quinze ans...
Le rôle social de l'école se conforte: nécessité se fait jour d'évaser
les admissions par l'accueil d'enfants issus de familles militaires
nombreuses. Dès 1944, il faut aussi adjoindre une aile supplémentaire
aux bâtiments existants. L'école dénombre deux cent cinquante élèves
en 1945. À la rentrée de 1947, l'école s'ouvre aux sections préparatoires
aux concours de l'Ecole de l'air de Salon de Provence (premiers admis
en 1948) et de l'Ecole des officiers mécaniciens. Elle assure un enseignement
technique qui fonctionnera jusqu'en 1981, qui conduit aux CAP / BEP
et aux baccalauréats techniques F1 et F3 d'une part, au baccalauréat
mathématiques élémentaires et philosophie d'autre part. En 1950, la
musique de l'école accompagne cent cinquante pipins à Laffrey, habillés
en grognards de la Grande Armée, venus là pour commémorer le cent cinquantième
anniversaire du retour de Napoléon, de l'île d'Elbe. Qui devinerait
alors, que sous chaque bonnet à poils de nos jeunes grognards, se dissimule
une grosse boîte de conserve, venue tout droit des cuisines de l'école.
Le 19 mars 1955, sort le premier numéro du " Carnet de bord " de l'école.
L'idée de ce bulletin de liaison avait jailli du cerveau enthousiaste
de trois élèves. La base aérienne 749 de Grenoble est créée le 1er,
mars 1959 pour servir de support à l'école (moyens techniques, service
des sports, service médical). Le 28 mai 1963 ? ou le 28mars 1961 ? (NDLR:
Merci de le confirmer), l'école a l'honneur de se voir remettre son
drapeau par le général Martre. C'est le 27 mars 1966, alors qu'est dévoilée
la plaque commémorative où s'inscrivent les noms de dix sept anciens
élèves morts au combat, que retentit pour la première fois la marche
des Pupilles de l'air: c'est la concrétisation d'un long travail d'équipe
entre le professeur de français, monsieur Thieulle et ses élèves. Sous
le regard du général de Gaulle, la musique est aussi présente à la cérémonie
d'ouverture des jeux Olympiques de Grenoble en 1968: en tête de chaque
délégation nationale d'athlètes, un pipin tient la pancarte. (Si tu
as des documents: films, photos, textes, enregistrements, il serait
sympa de me les communiquer pour les intégrer dans cette rubrique)
Arrivent alors les années soixante dix. La population scolaire s'est
diversifiée au profit des cas sociaux. Les orphelins ne représentent
plus que 52 % des cinq cents élèves. Epoque où l'école se pare de l'éventail
optimum des séries qui préparent au baccalauréat: A, C, D, F1/F3 et
BEP/CAP. Le 1er avril 1973, la BA 749, dissoute, laisse place à l'Ecole
des pupilles de l'air 749 dont la structure prend un aspect définitif.
Alors que les moyens généraux assument la fonction support, la partie
enseignement repose sur le proviseur, le censeur des études, l'officier
des sports, l'officier mécanicien à qui incombe la responsabilité de
l'enseignement technique alors que le commandant en second dirige l'internat
et le service des activités culturelles. Vivent ainsi, sur près de trois
hectares, plus de sept cents personnes: cinq cents élèves, deux cent
trente cadres dont cinquante éducateurs appelés du contingent, l'école
a besoin d'espace.
En 1977, vingt et un hectares sont achetés par l'Armée de l'air, à Montbonnot.
Adieu aux murs de "Joseph Vallier ", qui ont scellé l'avenir de bien
des générations de pipins! L'enseignement technique ne suivra pas le
transfert. Confirmée dans sa vocation d'aide à la famille lors de la
réforme des lycées militaires de 1983, l'EPA poursuit sa mission d'éducation
et d'enseignement. Dominique Arbiol est la première jeune fille à intégrer
l'école en 1983 en classe préparatoire. Les effectifs ont augmenté de
façon significative : sur presque trois hectares, l'école compte en
son sein plus de sept cents personnes. Dès lors, un déménagement s'impose.
Trois ans plus tard, en décembre 1986, les pipins disent adieu au vaisseau
de nuit du boulevard Joseph Vallier, grisé par les années, les émanations
de la ville et tous ces pipins embarqués, même pour une année, qui ont
contribué à l'histoire de la "Boîte". Il a fallu tourner la page : "Adieu
Joseph Vallier et tes 45 ans d'histoire, de joie, de peine, de bonheur
et de souffrance!". Le nouveau site choisi est à la fois campagnard
et montagnard. L'école est implantée à Monbonnot, petite ville de la
périphérie grenobloise, accrochée à la Chartreuse, face au massif de
Belledonne. La "Boîte" a su s'adapter aux besoins de la jeunesse d'aujourd'hui.
Elle offre maintenant un cadre fabuleux, des installations sportives
de qualité et un encadrement toujours aussi "rude". Sur tous les sites
où l'armée de l'air est représentée, on entend toujours parler des "arpètes",
mais peu des "pipins". Pourtant il semblerait qu'ils soient aussi nombreux
que leurs cadets venus de Saintes et dont les meilleurs ont pu intégrer
l'EPA au niveau des classes préparatoires. S'il existe une association
puissante pour les arpètes, celle des pipins est bien moins connue mais,
cependant, bien vivante.
En 1996, l'EPA vit une nouvelle restructuration. L'institution de jeunes
filles de la maison des Ailes d'Échouboulains en région parisienne,
soutenue également par l'armée de l'air a fermé ses portes en juin.
Ses activités sont transférées à la rentrée de septembre sur le site
de Montbonnot. La mixité est étendue aux classes du premier cycle. Après
les travaux d'extension de l'EPA pour l'accueil de ces jeunes filles,
la capacité de l'école a été portée à 800 élèves. De nouvelles filières
ont été créées, diversifiant et complétant la mission d'aide à la famille.
Il s'agit notamment des baccalauréats dans les séries L (littéraire)
et STT (sciences et techniques tertiaires) ainsi que du BEP métiers
de la comptabilité. En 1994, environ 6800 élèves avaient été admis à
l'Ecole des pupilles de l'air depuis la première rentrée scolaire de
septembre 1941.